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L’administrateur d’une société par actions doit-il s’abstenir de voter en cas de conflit d’intérêts?

Oui, le paragraphe 120(2) de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (ci-après la « LCSA ») et l’article 127 de la Loi sur les sociétés par actions (ci-après la « LSA ») interdisent à l’administrateur ayant un conflit d’intérêts de voter sur la décision en question, à l’exception des cas spécifiques prévus par ces lois.

La législation attribue à l’administrateur un devoir de loyauté envers la société, lequel inclut le devoir fiduciaire d’agir au mieux des intérêts de celle-ci. L’administrateur doit donc agir dans le seul intérêt de celle-ci, sans tenir compte des intérêts d’aucune autre personne (ex. : actionnaires, créanciers, employés, etc.). À titre de mandataire de la société, l’administrateur doit éviter de se placer dans une situation où son intérêt personnel s’opposerait à celui de la société et doit agir de manière désintéressée.

En outre (et sous réserve de certaines nuances entre les sociétés fédérales et provinciales), la loi impose à l’administrateur d’une société par actions l’obligation de :

  • dénoncer au conseil d’administration de la société l’intérêt qu’il, qu’une personne qui lui est liée ou qu’une personne morale dont il est administrateur ou dirigeant, a dans un contrat ou une opération de la société et, de manière générale, tout intérêt susceptible de le placer en situation de conflit d’intérêts; et
  • s’abstenir de voter sur la décision visée par ce conflit d’intérêts.

Un lien de parenté entre un administrateur et la personne visée par la décision du conseil d’administration n’infère pas, à lui seul, une présomption d’existence d’un conflit d’intérêts. Malgré l’apparence de partialité, l’intérêt conflictuel doit être réel et substantiel dans les circonstances.

Il y a lieu de souligner certaines particularités applicables aux sociétés par actions fédérales uniquement, la LSA ayant expressément prévu aux articles 127 et 128 une application contraire à ces principes pour les sociétés provinciales. Bien qu’il ne puisse participer au vote, l’administrateur d’une société par actions fédérale a tout de même le droit d’assister à la réunion du conseil d’administration et aux délibérations sur la question pour laquelle il a un intérêt, à moins que les statuts ou règlements de la société n’imposent certaines restrictions à cet effet. D’ailleurs, la présence de l’administrateur intéressé tout au long de cette réunion peut même être essentielle pour atteindre le quorum requis et permettre au conseil d’administration de la tenir.

Qu’advient-il si l’administrateur intéressé contrevient à ses obligations de dénonciation d’intérêt ou d’abstention de vote? Le conseil d’administration ou les actionnaires pourraient alors demander à un tribunal de prononcer l’annulation du contrat ou de l’opération en question et d’enjoindre à l’administrateur ou au dirigeant intéressé de rendre compte. Inutile d’aborder les inconvénients que cette situation pourrait engendrer.

Voici quelques bonnes pratiques qui pourraient prévenir certaines situations conflictuelles :

  • il pourrait être prudent pour un administrateur d’une société par actions de se retirer de la délibération et de la prise de décision en cas d’apparence de partialité ou de conflit d’intérêts potentiel;
  • les règlements de la société peuvent servir à clarifier la marche à suivre en cas de conflit d’intérêts d’un administrateur, à condition de ne pas contrevenir aux règles de la LCSA et LSA, lesquelles sont d’ordre public;
  • la société pourrait adopter une politique claire et spécifique à la gestion des conflits d’intérêts au sein du conseil d’administration.

Pour toute question sur les devoirs et obligations des administrateurs, n’hésitez pas à communiquer avec Me Carelle Boumerhi.

Pour toute autre question d’ordre légal, n’hésitez pas à communiquer avec Me Francis Arnaud Marcotte, associé chez Therrien Couture Joli-Cœur.


Par Carelle Boumerhi Avocate