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Article rédigé par Nathalie Schneider dans le cadre du Parcours DD en tourisme, une initiative pilotée par l’Alliance et rendue possible grâce à la collaboration et au financement du ministère du Tourisme.  

Projet d’adaptation aux changements climatiques du Tourisme, Laboratoire vivant aux Îles-de-la-Madeleine et dans les Laurentides, 2023-2024

© Nathalie Schneider

Imaginer des solutions innovantes pour amener les petites et moyennes entreprises (PME) touristiques des Îles-de-la-Madeleine et des Laurentides à développer et expérimenter des mesures d’adaptation aux changements climatiques : c’est l’objet du projet collaboratif interrégional dirigé par Alexis Guillemard dans le cadre de son post-doc (UQAM, département Études urbaines et touristiques).

Pour ce faire, celui-ci a ciblé deux territoires du Québec – les Îles-de-la-Madeleine et les Laurentides – qui comptent un créneau d’excellence en tourisme, soutenu par le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie dans le cadre de la démarche ACCORD. Ces deux régions sont particulièrement affectées par les effets des changements climatiques, avec une instabilité des températures, des précipitations extrêmes ou, encore, des ouragans. Loin de s’en tenir à un exercice de recherche analytique, ce projet a l’ambition de mettre en lumière les solutions concrètes d’adaptation instaurées par les entreprises touristiques soumises aux enjeux de la crise climatique.

« Notre objectif, c’est d’aboutir plus largement à une transformation des pratiques par l’expérimentation, d’où l’idée du laboratoire vivant », explique Alexis Guillemard. Dans le cadre du volet Îles-de-la-Madeleine, Alexis a rencontré plusieurs acteurs primaires et secondaires du tourisme afin d’identifier leurs besoins en termes d’adaptation et d’innovation : excursionnistes en mer, hébergeurs touristiques, artisans, membres d’organisme en environnement, entrepreneurs culturels, etc.

De ces rencontres sont nées quatre pistes de collaboration, dont la première : la revitalisation des berges par le myrique des Îles, une espèce qui démontre, outre un attrait esthétique, une propriété fixatrice du couvert végétal. La deuxième piste s’intéresse à la santé psychologique des acteurs en tourisme mise à mal par l’anxiété et le sentiment d’impuissance provoqués notamment par des impacts climatiques violents. La troisième piste, élaborée en partenariat avec Ouranos est motivée par la nécessité d’instaurer un discours uniformisé destiné aux acteurs du tourisme à propos des effets visibles des changements climatiques. « Les visiteurs posent beaucoup de questions sur l’érosion des berges par exemple, explique Alexis Guillemard. Il est nécessaire de doter les intervenants touristiques d’un discours uniforme, qui ne sombre ni dans le sensationnalisme ni dans le déni. » Enfin, la quatrième thématique se penche sur le cas particulier du Château Madelinot et son activité d’observation des blanchons, une activité éminemment identitaire et un produit d’appel symbolique qui tend à disparaitre à cause du réchauffement climatique.

« Certains de nos interlocuteurs sont déjà en phase d’adaptation, soutient Alexis Guillemard. Ce projet a l’ambition de capitaliser sur ces actions et de créer un transfert d’expériences entre les entreprises soumises aux mêmes défis ». Ce projet est réalisé et financé dans le cadre de l’Action 27.7 du PACC 2013-2020 sous la responsabilité du MTO.

Le système ski québécois face aux changements climatiques

© Association des stations de ski du Québec

En partenariat avec Ouranos, l’Association des stations de ski du Québec (ASSQ) a lancé cette étude en 2020 (repoussée à 2022 à cause de la pandémie). Son objectif : comprendre les vulnérabilités aux changements climatiques à laquelle fait face l’industrie du ski alpin. Trente stations, de modèles d’affaires différents (privées, municipales et OBNL), et de toutes les régions du Québec, ont participé volontairement à cette étude financée par le ministère du Tourisme à laquelle ont aussi collaboré l’Université de Sherbrooke (UQS) et l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Si Ouranos est le chef d’orchestre qui concentre l’expertise climatique, l’ASSQ intervient en tant que courroie de transmission avec les stations. Enfin, l’UQS évalue les indicateurs économiques liés à la non adaptation des stations aux changements climatiques, tandis que l’UQTR mesure la notion de sensibilité qui intervient dans l’adaptation et la capacité d’adaptation des entreprises aux prises avec cet enjeu.

Ces stations ont été invitées à identifier les problématiques spécifiques auxquelles elles font face et à réfléchir sur des solutions adaptées : faciliter l’accès à des données climatiques historiques et futures de neige au sol sur l’ensemble du Québec; comprendre les vulnérabilités du système ski, à l’échelle du secteur ski et à l’échelle des stations, rendre les stations de ski plus autonomes dans l’élaboration de leur plan d’adaptation aux changements climatiques, élaborer un plan de résilience sectoriel qui permettra de développer des connaissances à l’échelle de l’industrie du tourisme et de contribuer à l’élaboration des stratégies régionales durables et résilientes.

Attitude Montagne : l’escalade de glace en mode adaptation 

© Attitude Montagne

« Nous sommes très dépendants de la météo, dit en préambule Dominic Asselin, fondateur et chef guide d’Attitude Montagne, un centre d’escalade basé à Saint-Adolphe-d’Howard qui cumule deux volets : loisir et formation. Ces dix dernières années, on a eu des gros soubresauts comme des pluies en hiver qu’on ne voyait pas avant. On s’est donc interrogés pour voir comment nos activités pourraient être moins impactées par ces phénomènes. » En guise d’adaptation, cette entreprise a développé davantage ses formations données sur place, avec l’accès à des murs de pratique intérieurs quand le volume de glace des cascades n’est pas suffisant.

Mais c’est la gestion des cascades de glace qui constitue l’enjeu le plus sensible pour Attitude Montagne. « Au début de février, dans les Laurentides, on vit les conditions qu’on observe généralement à la mi-décembre, constate Dominic Asselin. La paroi principale de la station Mont-Tremblant ne gèle pas car il ne fait pas assez froid. C’est la première année où on n’a pas été capable de travailler sur cette paroi. » Autre adaptation : son propre site, l’entreprise a mis en place une pompe qui puise l’eau du lac et qui arrose les parois d’escalade pour fabriquer de la glace grâce à un ingénieux système de tuyaux interconnectés. Des valves permettent de contrôler le débit et la direction de l’arrosage selon la température. « Avant, on faisait ça uniquement en début de saison, explique Dominic Asselin. Maintenant, on le fait tout au long de l’hiver à cause des variations de température. » En 2023, des pannes d’électricité à répétition ont forcé l’équipe à repenser le système en ajoutant un panneau de contrôle et un fil chauffant sur le tuyau du lac pour ne pas que la pompe explose à cause du froid quand l’électricité repartait. Bref : les changements climatiques forcent ces guides d’escalade à mettre en place des innovations technologiques pour poursuivre leurs opérations.

Les enjeux d’adaptation des territoires de montagne et des stations de ski en France 

© Parc régional Vercors

La France est la deuxième destination hiver la plus fréquentée au monde, notamment pour ses stations de montagne. Or, dans les Alpes, l’augmentation des températures est de +2° C contre une moyenne mondiale de 1,1° C, d’où la nécessité, pour cette destination, d’adopter une approche résiliente du tourisme de montagne. L’une des stratégies privilégiées est de développer le tourisme quatre saisons pour mettre en valeur le patrimoine naturel, mais aussi culturel, historique et gastronomique. À titre d’exemple, le parc naturel régional du Vercors, qui voit son couvert neigeux diminuer de 25 % depuis 50 ans, a adopté une stratégie de diversification de ses activités en mettant de l’avant une nouvelle marque, Inspiration Vercors, dont l’objectif est de renforcer l’attractivité sans miser uniquement sur l’hiver. Pour ce faire, des circuits de découverte ont été mis en place, comme la Via Vercors, un itinéraire de 55 km à vocation touristique, ou encore des parcours thématiques pour découvrir les paysages, le savoir-faire local et la gastronomie. Dix ans après avoir été mise en place, cette stratégie de diversification semble porter ses fruits puisque la fréquentation du parc est désormais aussi importante toute l’année qu’en hiver.

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Soutenir le développement des capacités d’adaptation pour diminuer les vulnérabilités des régions et des entreprises touristiques face aux changements climatiques

Pour ce faire, Ouranos accompagne le secteur touristique de diverses manières. D’une part, le pôle d’innovation mène des activités concertées afin de mieux comprendre la portée des risques, identifier les opportunités, les stratégies d’affaires et la réalisation de mesures d’adaptation, et ce, sur la base de projets pilotes. D’autres parts, le pôle d’innovation perfectionne des outils d’aide à la décision en relation avec les besoins des intervenants touristiques et développe de nouvelles connaissances liées à la gestion de risques, aux barrières et aux coûts de l’adaptation par la réalisation d’études multidisciplinaires.