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Dans la foulée du « Liberation Day » du Président Trump le 2 avril dernier, les prévisionnistes ont révisé à la baisse, de façon généralisée, leurs perspectives de croissance économique. Étant donné le climat d’incertitude particulièrement exceptionnel (le pléonasme est intentionnel!), ils accompagnaient leurs prévisions de mises en garde quant à leur fiabilité.

Force est de constater, six mois plus tard, que la nouvelle politique commerciale américaine s’avère moins sévère et dévastatrice que prévu – du moins, pour l’instant.

Cette édition de l’Escale économique offre une mise à jour des perspectives économiques et s’attarde sur la situation des consommateurs.

Perspectives économiques

Bien que les États-Unis continuent d’annoncer, d’appliquer, de suspendre et de remettre en place toutes sortes de tarifs à ses partenaires commerciaux, le Québec et le Canada ont été jusqu’à présent relativement épargnés.

Selon les estimations de la Banque Nationale du Canada, le taux effectif des tarifs à l’importation appliqués aux produits canadiens atteindrait 5 %, ce qui se compare avantageusement au 19 % que les États-Unis imposent en moyenne à leurs autres partenaires commerciaux. Merci à l’Accord de libre-échange Canada–États-Unis-Mexique (ACEUM) qui limite la portée des différents droits de douane appliqués aux produits canadiens. En effet, près de 85 % des produits canadiens importés par les États-Unis sont conformes à cet accord, ce qui exonère la majorité des produits canadiens des droits de douane.[1]

Conséquemment, bien que l’incertitude à l’égard de la politique commerciale américaine demeure élevée, les perspectives économiques ont été révisées à la hausse au courant de l’été. La moyenne des prévisions des principales institutions financières canadiennes concernant la croissance économique du Québec en 2025 est passée de + 1,5 % (prévisions de janvier) à + 0,7 % (avril) et à + 0,9 % (octobre). Les correctifs apportés aux prévisions des économies du Québec et du Canada pour 2025 et 2026 sont présentés dans les graphiques suivants.

Incertitude et confiance des consommateurs

L’impact des droits de douane sur les industries exportatrices n’explique qu’en partie le ralentissement économique observé au Canada et au Québec. La majeure partie du ralentissement découle de l’incertitude qui entoure les tarifs, incertitude qui mine la confiance des entreprises et des consommateurs. Alors que les premiers reportent des investissements et gèlent l’embauche, les seconds jouent de prudence et reportent des dépenses importantes (p. ex., l’achat d’une maison, d’une piscine ou encore… d’un voyage).

Les indices de confiance des consommateurs du Conference Board et de l’Université du Michigan sont les principaux indicateurs du niveau d’optimisme des consommateurs québécois, canadiens et américains à l’égard de la conjoncture économique. Ils sont reconnus et utilisés comme indicateurs avancés des ventes de produits de consommation.[2][3] Une confiance élevée indique généralement que les consommateurs sont susceptibles d’augmenter leurs dépenses.

L’indice de confiance des consommateurs américains de l’Université du Michigan a fortement chuté en début d’année. Exception faite de la pandémie, cet indice n’avait jamais autant reculé sur quatre mois qu’entre janvier et avril 2025 (-29,5 %). Conséquemment, il n’est pas surprenant de constater un recul dans les entrées de touristes américains à la frontière. Depuis le début de l’année (de janvier à septembre), l’indice de confiance des consommateurs américains a reculé de 26 % alors que le nombre d’entrées de touristes américains par voie aérienne et terrestre a diminué de 9 % au Québec et de 6 % au Canada.[4]

Somme toute, après s’être détériorés en début d’année, les indices de confiance des consommateurs québécois, canadiens et américains se sont raffermis au printemps et au début de l’été. Toutefois, depuis juillet, ils stagnent au Canada et au Québec et se détériorent aux États-Unis.

Marché du travail et démographie

Depuis juillet, le marché du travail affiche quelques signes de faiblesse au Québec et au Canada. La création d’emploi a été nulle, voire légèrement négative au 3e trimestre : – 6 000 emplois au Canada et – 1 630 emplois au Québec. Le taux de chômage au Canada a d’ailleurs atteint 7,1 % en septembre 2025, soit le plus haut taux enregistré depuis juillet 2021.

Une particularité du marché du travail au cours des prochaines années est que la population du Québec déclinera, une première (du moins depuis 1940, aussi haut que remontent les données).[5] La récente mise à jour de l’Institut de la statistique du Québec concernant les perspectives démographiques du Québec et de ses régions n’est pas réjouissante. Une baisse de la population québécoise d’environ 80 000 personnes (-0,9 %) est anticipée d’ici 2030, en raison surtout de la réduction attendue de l’immigration temporaire.[6]

Alors que la croissance de la population du Québec n’augmentera que très faiblement entre juillet 2025 et juillet 2026 (+0,1 % en 2025-26), elle commencera à diminuer dès juillet 2026 (-0,4 % en 2026-27). Inévitablement, ce recul de la population se répercutera négativement sur le potentiel de croissance de l’économie québécoise et sur les dépenses de consommation des Québécois.

Somme toute

Le Québec et le Canada devraient éviter de justesse une récession en 2025. Après s’être contractée au 2e trimestre au Québec et au Canada, la croissance économique devrait y être atone au 3e trimestre et faible au 4e trimestre.

L’inflation ayant ralenti, la Banque du Canada continuera à diminuer son taux directeur au cours des prochains mois, ce qui devrait stimuler l’activité économique en 2026. De même, le budget fédéral du 4 novembre sera ponctué d’une série d’investissements stratégiques, ce qui devrait également avoir pour effet de stimuler l’économie l’an prochain.


[1] Banque Nationale du Canada, Le mensuel économique – Septembre 2025

[2] The Conference Board of Canada, Index of Consumer Confidence

[3] University of Michigan, Surveys of Consumers

[4] Statistique Canada, tableaux 24-10-0056-01 et 24-10-0057-01

[5] Statistique Canada, Tableaux 17-10-0005-01 et 17-10-0027-01

[6] Institut de la statistique du Québec, Bulletin sociodémographique, Volume 29, numéro 2, juillet 2025