Article rédigé par Nathalie Schneider dans le cadre du Parcours DD en tourisme, une initiative pilotée par l’Alliance et rendue possible grâce à la collaboration et au financement du ministère du Tourisme.
L’ATR : Destination Québec cité
L’Association de la région touristique de Québec invite ses visiteurs à compenser les gaz à effet de serre émis par leur séjour.
Durant l’année 2022-2023, le tourisme a généré, dans la région de Québec, quelque 855 tonnes de gaz à effet de serre (GES). Grâce au calculateur de GES, mis en place en 2022 par l’ATR, les visiteurs désireux de compenser leur empreinte carbone ont permis de planter 6206 arbres dans la région.
Toute première ATR à avoir instauré un calculateur de GES accessible à tous, Destination Québec cité veut s’imposer comme une destination durable et responsable à même de sensibiliser et d’impliquer ses visiteurs, tant québécois qu’étrangers, dans la réduction de leur empreinte carbone.
Cet outil, intitulé Carbone boréal, a été créé par l’institut de recherche de l’Université du Québec à Chicoutimi. Il permet d’une part aux visiteurs de mesurer l’empreinte carbone de leur séjour dans la région : déplacement (aérien, terrestre), repas, activités, hébergement, etc., mais suggère également à ces mêmes visiteurs de compenser l’empreinte carbone liée à leur voyage à Québec depuis leur arrivée jusqu’à leur départ. Véronique Desmarais, directrice de la section du développement de la destination durable à l’ATR, insiste : « Compenser ses activités, c’est bien ; mais il faut surtout les réduire autant que possible à la source. »
©Jeff Frenette Photography
Le calculateur des GES n’est qu’un des moyens mis en place pour réduire l’empreinte carbone dans la région de la Capitale-Nationale. L’ATR a aussi lancé un projet pilote avec l’Association hôtelière de la région de Québec, appuyé par le Réseau de transport de la région de la Capitale. Ce projet s’entend, avec une centaine d’établissements d’hébergement touristiques, pour attribuer une passe du Réseau de transports de la Capitale nationale aux visiteurs qui séjournent un minimum de deux jours dans la région. Ceci, dans le but de limiter les effets liés à leurs déplacements et encourager l’utilisation de modes de transport bas carbone.
« Depuis l’arrivée de Robert Mercure à la tête de notre organisation, les choix durables et responsables sont nos priorités, explique Véronique Desmarais. Depuis cette année, notre ATR est carboneutre et certifiée Biosphère, ce qui fait de la région touristique de Québec la première destination francophone du monde à détenir cette certification. De plus, nous avons un programme d’accompagnement par cohortes, en partenariat avec l’agence conseil en développement durable Ellio, pour aider nos entreprises membres à atteindre cette certification. » Autrement dit : prêcher par l’exemple.
L’ATS : Tourisme Autochtone Québec
L’association touristique sectorielle participe à un projet pilote pour amener ses membres à décarboner leurs pratiques.
Développé par Tourisme durable Québec, en collaboration avec Aventure Écotourisme Québec (AEQ), la Chaire en écoconseil de l’Université du Québec à Chicoutimi et PAR Conseils, l’Outil Bilan GES Tourisme permet aux entreprises de calculer les gaz à effet de serre émis par l’ensemble de leurs activités. C’est le premier outil de calcul d’émission de GES dédié aux organisations de l’industrie touristique au Québec. Disponible gratuitement, il inclut plusieurs calculateurs afin de répondre aux spécificités des secteurs du plein air et de la restauration notamment.
L’initiative Shipeku est une démarche innovante ralliant tourisme durable et autochtone, initiée par Tourisme Autochtone Québec (TAQ). Dans ce cadre, un projet pilote a permis, à des entreprises leaders en tourisme autochtone, de tester cet outil et de proposer des pistes pour améliorer leur empreinte carbone. C’est le consultant en tourisme Jean-Michel Perron qui a proposé de créer une première cohorte d’entreprises membres de TAQ, et ce, pour initier les entrepreneurs autochtones à utiliser cet outil. Celui-ci est présenté pour l’instant sous forme de fichier Excel, en attendant d’être transféré en outil numérique.
Dix-sept entreprises, incluant l’organisme Tourisme Autochtone Québec, ont ainsi suivi la formation pendant 18 mois et complété leur bilan carbone. « L’objectif du bilan, c’est de produire moins de carbone l’année suivante », explique Pierre Kanapé, conseiller en développement et coordonnateur de la transition durable chez Tourisme Autochtone Québec.
© Nathalie Schneider
« C’est un outil d’amélioration continue sur une base volontaire, avec des indicateurs propres à chaque entreprise : sources d’énergie, gestion des matières résiduelles, recyclage, etc. », explique Pierre Kanapé. Car, en matière de pratiques durables, les enjeux sont bien différents entre une entreprise située en région éloignée et une autre qui opère en milieu urbain.
« Un suivi sera fait avec les entrepreneurs participants pour s’assurer qu’ils dressent leur bilan l’année prochaine. Sinon, ça ne sert à rien. », conclut Pierre Kanapé. Car le plus gros du travail est fait la première année ; reste ensuite à le renouveler année après année et suivre les progrès réalisés en matière de réduction des GES.
L’organisation : Parc régional de la Montagne-du-Diable, dans les Laurentides
Ce parc régional fait partie de la première cohorte du parcours Transition bas carbone développé par Aventure Écotourisme Québec.
Apprendre à calculer les gaz à effet de serre émis par ses opérations et les réduire année après année en identifiant des pistes d’action : c’est l’objectif du parcours Transition bas carbone, un programme instauré par Aventure Écotourisme Québec (AEQ) en 2023 grâce à une enveloppe de 65 440 $ attribuée par le gouvernement du Québec. Ce programme est né dans le cadre de Destination durable et action concertée, une mesure de soutien administrée par le Fonds d’action québécois pour le développement durable, découlant du Plan pour une économie verte 2030 et du Plan d’action pour un tourisme responsable et durable 2020-2025.
« L’idée est de voir comment on évolue et, ensuite, de corriger certaines pratiques », explique Marie Legault, directrice du parc régional de la Montagne-du-Diable, l’une des 15 entreprises membres d’AEQ inscrites à la première cohorte du parcours Transition bas carbone. « Comme petite équipe, nous n’avons pas toujours le temps de réfléchir à nos actions, car nous sommes constamment en train de préparer la saison suivante. Ce programme nous a permis de prendre le temps de le faire. »
Durant les six ateliers du parcours, chaque entreprise a pu dresser la liste des enjeux auxquels elle fait face – consommation d’énergie, feux de camp, gestion des déchets – et calculer la quantité de GES émise par ses opérations. « Nous ne sommes pas des experts en environnement, dit Marie Legault. Grâce à la supervision de la firme Ellio, nous avons pu examiner toutes nos pratiques et trouver des solutions plus durables. » Ainsi, ce parc régional planche sur ses choix en matière énergétiques – électricité, diesel, gaz – et sur le poids de ses déchets – recyclage, compostage – ainsi que sur les mesures incitatives, comme le covoiturage, proposées à ses employés.
© Parc régional de la Montagne-du-Diable
Comme beaucoup de régions touristiques du Québec, celle des Laurentides, où est situé ce parc, a connu des variations soudaines et violentes des conditions météorologiques, notamment en 2023 avec de fortes pluies et des crues qui ont compromis l’accès au parc. « Les feux de forêt majeurs de 2023 étaient dans notre cour, ajoute Marie Legault. Nous avons dû fermer le parc à cause de la quantité de fumée qui arrivait chez nous. » Et de concéder : « Tant qu’on n’est pas impacté par les changements climatiques, on n’en prend pas conscience. »
La pérennité du parcours Transition bas carbone tient dans sa continuité et son amélioration. « Avec cette démarche de concertation sectorielle, nous souhaitons ancrer la lutte et l’adaptation aux changements climatiques au cœur du positionnement stratégique des entreprises participantes et amener notre secteur touristique à prendre des engagements de réduction des émissions de GES », conclut Stéphane Jeannerot, responsable du développement des entreprises chez Aventure Écotourisme Québec.
À l’international : Visit Vietnam
Ce pays d’Asie du Sud-Est veut s’imposer comme une destination touristique carboneutre.
Visit Vietnam, l’organisme officiel du tourisme vietnamien, s’est lancé le défi de réduire les émissions de gaz à effet de serre reliées au tourisme. Il répond ainsi à l’appel du programme des Nations Unies pour l’environnement, qui invite le secteur touristique mondial à réduire son empreinte carbone.
Le pays veut se positionner comme le bon élève en Asie du Sud-Est en matière de développement durable et responsable. Le village Tan Oa, situé dans le centre du pays, a d’ailleurs remporté le titre de meilleur village touristique du monde (Best Tourism Village) en 2023. Ce titre, décerné par l’Organisation mondiale du tourisme, salue ses pratiques durables et l’effort de ses habitants à conserver le paysage et l’identité culturelle de leur terre natale. Les actions de l’industrie touristique se concentrent notamment sur la réduction de son empreinte carbone grâce au développement de circuits verts et à la modernisation des transports incluant l’utilisation de véhicules propulsés aux énergies renouvelables.
L’une des plus importantes entreprises touristiques du pays, Vietravels Holdings, a lancé en 2013 le programme Go Green, comprenant plusieurs mesures, notamment le calcul de l’empreinte carbone pour chaque voyageur autant pour ses déplacements que pour son hébergement et ses activités. Cette approche inspire de nombreuses autres entreprises touristiques à s’engager dans ce sens.
© Visit Vietnam_Grotte de Son Doong
Car s’attaquer à l’émission des GES induit d’abord de mesurer et de réduire, à la source, son empreinte carbone. C’est ce que s’efforce de faire Oxalis Adventure, un tour operator local spécialisé dans l’organisation de voyages d’aventure, qui limite le nombre de ses visiteurs annuels à 1000 pour explorer à pied la grotte de Son Doong, l’un des sites les plus attractifs du pays.
Autre illustration : la province de Bên Tre, située dans le delta du Mékong, remet à ses visiteurs un « passeport vert », dans lequel chacun d’eux compile l’empreinte carbone des activités qu’il pratique, afin d’amener les entreprises à faire leur part dans la décarbonation. Cette initiative unique au monde permet en outre d’inviter les touristes à se questionner sur le rôle déterminant qu’ils jouent à l’égard du tourisme durable.
Pour passer le pas
– S’assurer de mesurer et de réduire, autant que possible, son empreinte carbone avant de la compenser.
– Compenser l’empreinte carbone de ses voyages et ses séjours grâce à des calculateurs fiables.
– Privilégier les séjours plus longs dans une seule destination plutôt que l’itinérance pour limiter ses déplacements et, donc, son empreinte carbone. Ceci, en conformité avec le slow tourism (ou ralentourisme), une approche qui privilégie la mobilité douce et les comportements responsables.
– Préférer les transports actifs (marche, vélo) et les transports collectifs (covoiturage, autobus) à l’utilisation de la voiture avec un seul passager.
– Soutenir l’achat local et le circuit court durant ses séjours touristiques.
– Privilégier les entreprises touristiques qui démontrent un intérêt réel et posent des gestes concrets qui vont dans le sens de la décarbonation.